Le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu sera mis en place à partir du 1er janvier prochain. Hésitant, le gouvernement a presque fait machine arrière avant de confirmer une mesure majoritairement appréciée par les Français interrogés sur le projet. Qu’est-ce que cela va changer concrètement ? Explications.
63% des Français interrogés favorables
C’est officiel ! Depuis le 4 septembre dernier, le gouvernement d’Edouard Philippe a validé la réforme économique consistant à prélever l’impôt sur le revenu à la source. Avant cette annonce effectuée sur le plateau de TF1 mardi dernier, le chef de file du gouvernement s’est montré indécis laissant poindre un rétropédalage politique de dernière minute. Pourtant, cette mesure a visée simplificatrice est majoritairement voulue par les Français. Sur 1 005 personnes interrogées par l’institut Odoxa, ils sont en effet près de 63% à se déclarer « favorables » à cette réforme, d’après l’étude publiée le jour de l’officialisation. Ce bon résultat est à contrebalancer avec un autre plus négatif : les Français interrogés sont 70% à craindre d’éventuelles erreurs. C’est le point noir du projet. Et, c’est ce qui a causé tant d’hésitations de la part du président Emmanuel Macron. Des tests ont été effectués en amont pour analyser la faisabilité administrative du projet. Des bugs disparates ont été confirmés. Parmi les erreurs revenant régulièrement, des personnes ont été prélevées plusieurs fois quand d’autres ont été prélevées par erreur à cause d’un homonyme. Les erreurs constatées par le ministère de l’économie concerneraient cependant moins de 1% de l’ensemble des contribuables.
Pourquoi une telle réforme ?
C’est l’un des grands chantiers de modernisation de l’appareil administratif français. La réforme, qui devait entrer en vigueur en janvier 2018, était l’une des promesses de campagne de François Hollande et d’Emmanuel Macron. Aujourd’hui, l’impôt sur le revenu est payé l’année suivant la perception des revenus. Ce qui peut être contraignant pour ceux qui manquent de trésorerie au moment fatidique de recevoir son avis d’imposition à la rentrée. Des changements de situation comme la perte d’un emploi, la mise à la retraite, la baisse de revenus d’une année sur l’autre ou l’arrivée d’une naissance peuvent intervenir et déstabiliser les ménages les plus fragiles. Bercy estime que 30% des contribuables perdent en revenus d’une année sur l’autre. Cette réforme vise ainsi à s’adapter immédiatement aux changements de situation que peuvent vivre d’année en année les contribuables.
L’autre grand objectif est de simplifier les démarches en prélevant l’impôt directement sur la fiche de paie. Mensualiser l’impôt permet d’éviter de différer le paiement l’année suivante. Jusqu’ici, tous les principaux pays occidentaux pratiquent la retenue de l’impôt à la source. En Europe, les seules exceptions sont, pour l’heure, la France et la Suisse.
L’impôt est prélevé par l’employeur
Pour les salariés, l’impôt sera dorénavant directement prélevé par l’employeur qui devient par conséquence le collecteur principal. Il peut également s’agir de la caisse de retraites pour les retraités imposables et de Pôle emploi pour les personnes en situation de chômage. L’impôt sera dès lors étalé sur douze mois. Chaque mois, l’entreprise prendra l’impôt sur le montant net imposable des salaires. Tout sera indiqué sur la fiche de salaire au même titre que le prélèvement des cotisations sociales. Pour le salarié, la conséquence directe sera la baisse de la rémunération sur la fiche de paie. Mais, tous les salaires ne sont pas concernés. Par exemple, dans le cadre d’un taux neutre appliqué (voir plus bas), si un salarié gagne jusqu’à 1 367 euros, le taux est de 0%. Concrètement, la dernière ligne du bulletin de paie ne bougera pas car il ne sera pas déclaré comme étant imposable. En revanche, un employé gagnant 1 800 euros par mois se verra appliqué le taux neutre de 4,5%. Ainsi, à compter du 1er janvier 2019, 81 euros seront prélevés chaque mois sur son salaire qui ne s’élèvera donc plus qu’à 1719 euros net. Pour un salaire avoisinant les 6 000 euros et un taux culminant à près de 20%, 1 200 euros seront retenus sur la fiche de paie.
Bien choisir son taux
Le contribuable peut décider du taux de prélèvement qui sera appliqué à ses revenus jusqu’à la date limite du 15 septembre prochain. Pour cela, le salarié doit se rendre sur son espace « Gérer mon prélèvement à la source » sur le site Internet du Gouvernement. Trois options s’offrent aux employés :
- Taux personnalisé : Ce taux prend en compte l’ensemble des revenus déclarés par le foyer fiscal pour l’année 2017. Au sein d’un couple par exemple, chacun aura ainsi le même taux sur sa fiche de paie. Sauf si le choix se porte sur le taux individualisé plus avantageux en cas de différence de salaires dans le ménage.
- Taux individualisé : C’est un taux qui s’adresse essentiellement aux couples mariés ou pacsés dont les revenues seraient disparates. L’objectif est de répartir au mieux l’impôt sur le revenu en fonction des ressources du couple. Chaque salarié du ménage aura donc un taux qui correspond à son salaire. En clair, celui ou celle qui gagne le plus sera davantage prélevé sur son salaire. C’est un taux qui se veut équitable dans le cadre d’un ménage.
- Taux neutre : A l’inverse du taux personnalisé, il est possible de ne pas transmettre d’autres informations sur ses ressources à son employeur. Avec le taux neutre ou non-personnalisé, l’employeur met en pratique un taux uniquement basé sur la seule rémunération. Ce qui ne tient pas compte des revenus annexes. L’intérêt de ce taux réside dans le cas où un salarié perçoit des revenus importants qu’il ne souhaite pas mettre à la connaissance de son entreprise.
En cas d’erreur sur le taux choisi, il est bon de savoir qu’il est possible de le changer. L’administration fiscale prendra en compte la rectification du contribuable à compter du troisième mois après le changement déclaré.
Le calendrier du prélèvement de l’impôt à la source
Le prélèvement à la source sera appliqué à compter du 1er janvier 2019. Mais, les échéances débutent bien avant. Dès ce mois-ci, en septembre, c’est le paiement du solde de l’impôt sur le revenu de l’année 2017. L’année 2018, elle, devient une année fiscale considérée comme blanche. Jusqu’au 15 septembre, le contribuable doit choisir quel taux il souhaite appliquer. Sans réponse de sa part, c’est le taux neutre qui sera mis en place automatiquement. En octobre, le taux choisi – ou non – est envoyé à l’employeur pour les salariés, à la caisse de retraite pour les retraités et à Pôle emploi pour les demandeurs d’emploi. Le taux devra ainsi être mentionné sur le bulletin de salaire à partir du mois d’octobre. C’est une mesure à titre indicatif puisque aucun prélèvement ne sera effectué avant le 1er janvier 2019, date de la mise en place du projet.
Le prélèvement de l’impôt à la source n’exempte par les contribuables de réaliser une déclaration annuelle chaque printemps. Celle-ci permettra d’actualiser le taux et de réclamer, dans le meilleur des cas, que l’administration rembourse d’éventuels trop-perçus.